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Comment une faute de frappe a changé le destin des épinards ?

Publié le 2 octobre 2024 à 09h02

Bol rempli de feuilles d'épinards fraiches sur une planche de cuisine en bois, tout cela sur une table en bois.
Bol rempli de feuilles d'épinards fraiches sur une planche de cuisine en bois, tout cela sur une table en bois.

Il y croyait dur comme fer, mais Popeye s’est trompé. La feuille d’épinard n’a rien d’un super aliment. Tout cela à cause d’une faute de frappe…

C’est l’une des plus vieilles fake news de l’histoire contemporaine. Depuis des décennies, les épinards sont sur un piédestal, réputés pour leur richesse phénoménale en fer. En partie grâce à Popeye, le super-héros des marins qui devient surpuissant après avoir englouti une boîte de ce légume vert. Mais voici la vraie histoire : cette réputation d’aliment miracle est en fait le fruit… d’une erreur de calcul !

Une légende, née à une virgule près

Pour comprendre les origines d’un mythe nutritionnel, il faut remonter dans le temps. Nous sommes en 1870 en Allemagne dans le laboratoire du chimiste allemand Erich von Wolf. Ce dernier étudie les vertus des légumes, et la feuille d’épinard est l’un de ses sujets du moment. Dans son rapport sur la teneur en fer de notre légume vert, il commet une erreur : au lieu de 3,5 milligrammes de fer pour 100 grammes d’épinards, il note 35 milligrammes de fer. Résultat : un rapport pharaonique qui donne instantanément aux épinards un statut de superaliment. Aussi grossière que cette coquille puisse paraître, elle se propage dans les études et les ouvrages, au nez et à la barbe de tous les scientifiques. Et puisque personne ne remet ce chiffre en question, le grand public y croit dur comme fer.

Popeye, roi des épinards

C’est dans les années 1930 que le mythe de la feuille verte atteint son apogée. Popeye, le loup de mer le plus fort du port, est adapté en dessin animé en 1933. Dans les comics, il est naturellement le plus costaud. Mais dans le cartoon, il tire sa force surhumaine de sa consommation d’épinards en conserve. Une manière pour les scénaristes d’encourager la consommation de légumes chez les enfants. Dans l’imaginaire collectif des petits comme des grands, le pouvoir de vitalité et de force des épinards devient une évidence : les ventes d’épinards augmentent de 33% aux États Unis au début des années 30.

Toute la vérité, rien que la vérité

Popeye a beau être le plus balèze, il ne peut rien contre la science. Dans les années 1950, des chercheurs allemands reprennent le dossier et tentent le même calcul que von Wolf. Très vite, ils se rendent compte de la supercherie. D’abord, la valeur en fer des épinards n’est pas plus importante que celle contenue dans d’autres légumes. Ensuite, le fer contenu dans la feuille verte est « non héminique », ce qui veut dire qu’il est plus difficile à absorber pour le corps que le fer présent dans la viande. En réalité, ce qui rend les épinards vraiment intéressants sur le plan nutritionnel, ce sont leurs vitamines A, C et K, ainsi que leur apport en antioxydants et fibres. Le fer, lui, n’est qu’un invité discret dans cette petite salade de bienfaits.

Malgré la démolition du mythe par les scientifiques, le grand public continue de lier les épinards au fer, preuve du manque de communication sur le sujet. Quoi qu’il en soit, la prochaine fois que vous ouvrez une boîte d’épinards, souvenez-vous : vous ne gagnerez pas au bras de fer contre Popeye, mais vous profiterez quand même d'un joli cocktail de vitamines.

Auteur : Marin TDM

Crédit Photo : Lecic / iStock

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