# Culture & Loisirs
Le charme discret des vidéoclubs
Publié le 13 janvier 2025 à 15h24
Très populaire à l’ère pré-streaming, le vidéoclub a marqué et rythmé les dimanches soir en famille ou entre amis de toute une génération. Malgré la concurrence d’internet, certains font de la résistance pour faire perdurer l’essence des films : la passion du partage.
Il y a quelques semaines, fatiguée à l’idée de faire défiler sans fin des propositions impersonnelles sur mon écran, j’ai ressenti un besoin inattendu, presque nostalgique : celui de retrouver une relation plus tangible au cinéma. Puisque rien ne m’attirait en salles, au détour d’une balade je me suis retrouvée à pousser la porte d’un des rares vidéo-clubs encore en activité à Paris : le Vidéo Club de la Butte, rue Caulaincourt, au pied de Montmartre.
À gauche de l’entrée ouverte il y a 40 ans, une dédicace de Michel Gondry, le réalisateur de Soyez Sympa, Rembobinez, une comédie culte des années 2000 filmée… dans un vidéo-club. Hommage. Loin de la froideur des interfaces numériques, le lieu dégage une chaleur réconfortante. À travers les fenêtres, la lumière douce et feutrée illumine les étagères remplies de DVD, comme autant de portes ouvertes sur des mondes à explorer.
Faire un choix avec intention
Contrairement à l'algorithme qui vous propose des films à la chaîne, ici, chaque DVD semble avoir une histoire à raconter. Les rangées sont pleines de films classiques, d'œuvres rares et de pépites oubliées : une collection choisie avec soin, un retour à une forme de cinéphilie artisanale, où le film n’est plus une simple « option » mais une expérience précieuse. Il y a quelque chose d’infiniment plus humain dans ce geste de prendre un DVD en main, de lire la jaquette, de se laisser porter par une image, un nom, un souvenir.
Accompagnée d’un ami, nous nous sommes amusés à parcourir les étagères, comme deux enfants découvrant une bibliothèque cachée. Nous échangions nos anecdotes sur des réalisateurs, des films mémorables, et les répliques qui nous avaient marqués. À un moment donné, mon ami a éclaté de rire en tombant sur Rock’n’Roll de Guillaume Canet : « Je devrais prendre ça juste pour que personne ne tombe dessus ! », a-t-il lancé en plaisantant. L’expérience est concluante : le simple fait de manipuler des films physiques donne naissance à des échanges spontanés, des blagues, des souvenirs partagés, ce que, il faut bien admettre, la sélection dématérialisée ne permet pas toujours.
Un voyage dans le passé
Il y a encore 30 ans, on décomptait en France près de 5 000 vidéoclubs proposant des VHS, puis des DVD. Des lieux animés où chacun venait choisir le film qui égayerait sa soirée quand rien ne nous bottait à l’affiche ou dans le programme télé. Aujourd'hui, à peine une dizaine subsistent, survivants d’une époque révolue.
Le vidéo-club, c’est le retour à une convivialité presque oubliée. Les clients s’attardent, échangent des recommandations, discutent entre eux de leurs dernières découvertes ou de leurs films favoris. Il y a une douceur, une chaleur humaine qui contraste avec la solitude du visionnage en streaming. Ici, le cinéma redevient une expérience collective, une conversation où chacun a son mot à dire. Le propriétaire du lieu, véritable passionné, n’hésite d’ailleurs pas à venir discuter, glissant au passage quelques suggestions de films plus confidentiels, mais non moins remarquables. Dans cet espace, le cinéma n’est plus un produit de consommation rapide, mais un art qui se partage, se discute, se découvre ensemble… quand bien même on en profitera dans l’intimité de son chez-soi.
Dans un monde numérique où tout va trop vite, où les choix se font souvent sans y penser, une visite au Vidéo Club rappelle la possibilité d’une expérience plus lente, plus intentionnelle. Ici, le cinéma est encore un art qu’on choisit avec soin, un plaisir qu’on partage avec d’autres. Alors, pour renouer avec l’essentiel, faites-y un tour si vous en avez l’occasion !
Autrice : Carla P
Crédit Photo : Universal Pictures/Columbia Pictures