# Fêtes 2022
La gratuité des retours est-elle un désastre écologique ?
Publié le 9 octobre 2022 à 22h00
Avec le e-commerce, acheter en ligne n’a jamais été aussi simple. Seulement, cela a entraîné une augmentation des flux et des coûts non négligeables côté logistique et une surconsommation devenue quasi-incontrôlable. Pour ménager toutes les strates du e-commerce, les marques et les plateformes commencent à revoir leur modèle pour éviter le gaspillage.
Trop grand, trop petit, « pas conforme », « ne correspond pas à la description » … autant de raisons qu’il suffit de cocher sur le coupon de retour pour se débarrasser des articles dont on ne veut finalement plus. Avec le commerce en ligne et l’impossibilité d’essayer avant d’acheter, nos paniers se remplissent d’articles en double pour être sûr de pouvoir trouver chaussure à son pied. Les retours étant gratuits, cela ne coûte rien de commander en grande quantité, quitte à tout renvoyer par la suite.
Un phénomène de masse
Selon une étude de l’institut de sondage Statista publiée en juin 2022, 39 % des internautes français interrogés ont renvoyé au moins un article commandé sur Internet au cours de l’année écoulée. Initialement, les retours étaient censés inciter les gens à opter pour les achats en ligne plutôt que physiques. Mais, d’après ce sondage de la fédération du e-commerce (FEVAD), le retour gratuit est devenu un critère d’achat en lui-même : 37% des utilisateurs interrogés choisissent un site pour les retours gratuits, 36% pour la facilité de retour et de remboursement qu’il offre.
Dans un monde idéal, il ne serait pas dément de croire que les vêtements que nous renvoyons en boutique seront remis en rayon pour le plaisir d’un autre client. Cependant, avec la politique des retours gratuits, les enseignes ne savent plus gérer les quantités de vêtements renvoyées. Selon une tribune publiée dans The Guardian par Dilys Williams, directrice du Centre de la mode durable de l'Université de la mode de Londres, il est moins coûteux de jeter ou d’incinérer les articles plutôt que de les remettre en circulation. Il est vrai qu’une fois renvoyée, une pièce doit être triée, nettoyée, réintégrée dans les stocks – un processus particulièrement long qui ne profite pas à ces usines où l’instantanéité est le maître mot.
Trouver de nouveaux modèles
De plus, avec la hausse des prix des carburants et du carton, l’ensemble de la logistique voit ses coûts flamber. Il n’est pas rare que les colis renvoyés fassent le tour du monde avant de retrouver l’entrepôt. Un trajet phénoménal pour des pièces parfois portée une seule fois, le temps d’un photoshoot pour les réseaux sociaux ! Les émissions de CO2 liées à la livraison pourraient augmenter de 32% d’ici 2030, selon les prévisions du World Economic Forum. Pour sa part, l’ADEME « recommande donc de limiter les retours et de mutualiser les commandes » pour éviter d’entraîner une multiplication des transports et l’augmentation les émissions de gaz à effet de serre.
La politique de retour dans le e-commerce a toute sa place dans le débat écologique. En effet, si les achats en ligne émettent 36% en moins de gaz à effet de serre que les achats en physique, les renvois annulent ces économies. Depuis le début de l’année, les marques commencent à lutter contre le fléau de ces « reverse logistics » en facturant les retours. De grands groupes comme H&M ou Zara n’hésitent plus à demander entre 95 centimes ou 2,85€ pour la prise en charge des marchandises non souhaitées. Un prix dérisoire mais qui peut peser dans la balance. La livraison payante peut déjà s’avérer être un facteur de découragement des consommateurs à l'affût des achats très low cost. Si les enseignes de fast fashion s’y mettent, il y a bon espoir que cela montre l’exemple aux autres commerces en ligne.
Autrice : Carla P.
Crédit Photo : Liudmila Chernetska