Pauline de La Provôté, illustratrice : J'ai fait une année de prépa aux Gobelins et quatre ans à l'école Georges Méliès dans le cinéma d'animation, effets spéciaux et cinéma 2D/3D. C'est ma première bande dessinée, et j'ai terminé mes études de cinéma d'animation en juillet dernier. Ma formation et cette première expérience se sont totalement chevauchées. La première fois qu’on m’a contactée pour Trésor, j'étais en fin de deuxième année. On a signé quand j'étais en troisième année et j'ai illustré l'album sur la quatrième. 

Charlotte Cousquer, coloriste : Je fais pas mal de trucs différents. Je suis concept artist, artiste illustratrice de temps en temps et je travaille surtout dans l'animation. C'est la première fois aussi que je travaille en tant que coloriste sur une bédé. Et moi, j'étais à l'école Pivaut de Nantes.. J'y ai fait ma prépa et le reste de ma formation dans le cursus concept ART. J'ai colorisé Trésor au même moment que mes missions en animation. Je suis spécialisée dans tout ce qui est décor et Visual development donc les premières étapes de production.

Jean-Baptiste Saurel, scénariste : J'ai une formation de réalisateur de cinéma et de scénariste. Ces dernières années, j’ai plutôt réalisé des pubs, des courts métrages et quelques séries télé. Trésor est mon premier scénario de BD qui était d'ailleurs au départ une volonté d'en faire plutôt un film d'aventures pour le cinéma. Finalement, la BD s’est vite révélée être un bien meilleur territoire pour raconter cette histoire sans complexe. 

Jean-Baptiste : Entre le cinéma d'animation, les effets spéciaux, le cinéma traditionnel et la BD, on retrouve quand même des similitudes dans le découpage, dans la façon de raconter l'histoire. Ce sont les mêmes grammaires ! De plus, nous sommes tous les trois des lecteurs de BD. On se connaissait pas du tout, mais ça ne parait pas complètement incohérent qu'on finisse par se retrouver sur une BD d'aventures jeunesse, vus nos métiers respectifs. 

Pauline : Oui, on a vraiment le même langage. On se comprend assez rapidement.

Jean-Baptiste : Quand j’ai envoyé mon pitch, je savais déjà qu'il fallait en faire une BD. A force de réflexion, on s’est dit avec mon éditeur qu’il faudrait en faire trois tomes, qu’on précise la tonalité de l'histoire. Le processus est assez classique, similaire à ce que je peux faire avec un producteur dans le cinéma. Ça trouve ou pas les faveurs de l'éditeur qui, derrière, va continuer de nourrir le projet en ramenant des nouveaux collaborateurs, collaboratrices et en m'aiguillant un peu sur les grandes lignes de l'histoire. Avec Pauline, nous sommes dans des métiers de mise en scène, donc je réfléchis aussi par cadrage, par angle de caméra. Mon rôle est d’apporter le scénario, des dialogues et des directions de mise en scène. Après, Pauline réadapte et s'approprie aussi l’histoire.

Pauline : Le travail préalable du scénariste est très important pour le bon déroulement de la commission. Parfois, il sait exactement ce qui arrive dans son histoire, combien de cases il y aura par pages. Il y a des cases où il ne précise pas le cadrage comme d'autres où il se représente très bien la scène. Il amène aussi des références de film, de BD sur certaines scènes. A partir de ça je vais faire des propositions de dessins, de traits, de personnages puis je me lance sur l’encrage avant que Charlotte les mette en couleur.

Charlotte : De mon côté je suis arrivée assez tard sur la production. Je suis artiste-autrice en freelance mais comme j'aime beaucoup la couleur, un élément clé dans le dessin, j'ai eu envie de tester sans savoir où ça allait m'emmener. Trésor est une super expérience et je me vois déjà progresser dans cette discipline que je n'avais pas eu l'occasion d'approfondir. On y est allé tranquillement grâce à Pauline qui me faisait des sortes de board avec toutes les images de référence pour les ambiances qu'ils avaient en tête.

Pauline : Sur Instagram ou Pinterest et ce genre de sites, j'enregistre tout le temps des images, des dessins, des ambiances, des collections spéciales qui me font penser à Trésor. C'est plus simple que de donner des indications écrites, on visualise mieux ce qu'on cherche à obtenir comme résultat. Ces inspirations étaient transmises à Charlotte pour qu'elle puisse travailler sur les planches. Avec un peu d'organisation et ce petit ping pong, on a réussi à collaborer au mieux sur l'aspect visuel et artistique de l'histoire.

Charlotte : Tout ça, c'est hyper inspirant. Je passe des heures à enregistrer des ambiances et des trucs. De manière générale, cette façon de procéder était assez fluide.

Jean-Baptiste : Il y en a plein! Peter Pan, Les Goonies, Hook mais aussi Stevenson, Robinson Crusoé ou De Cape et de Crocs. On croise souvent les mêmes références dans l’iconographie pirate jeunesse. L'originalité de Trésor repose sur les enfants qui inventent eux-mêmes cette carte et deviennent responsables de leur univers, de leur imaginaire qui les dépasse. Pour le reste, c'est vrai que ça reste une grande aventure de bande. Une bande d'amis pas parfaitement assortis au début, puis qui va trouver son harmonie au fil des tomes et qui va devenir invincible. 

Pauline : Au niveau du dessin, j'ai été inspirée par pas mal de choses : ça va des Schtroumpfs qui ont à peu près la même structure, ronde et généreuse, que les enfants de Trésor jusqu'aux Nombrils, qui est bien plus récent ! C'est difficile de dire exactement quelles sont les inspirations en dessin car c'est un mélange d’un tas de références. Il y aussi quelque chose qu'on a retenu de l'animation au cours de l'élaboration de Trésor, qui sont les intentions de nos personnages et notamment la différence entre intention et action. Par exemple, une action, c'est dire « le personnage marche ». L'intention serait de dire « Le personnage marche avec l'impression d'être suivi ». Tout de suite, cela permet de communiquer beaucoup plus de choses dans le dessin. 

Jean-Baptiste : J’ai des enfants de cet âge-là. Je leur lis énormément d'histoires et ça me paraissait naturel de leur écrire une histoire. Il y avait aussi une super scénariste américaine qui avait dit qu’on est toujours bloqué à un certain âge dans les histoires qu'on raconte. Et moi, je sais que je suis clairement bloqué à l'âge de dix-douze ans. Tous mes projets auront certainement cette petite tonalité infantile, adolescente. C'est assez naturel pour moi de faire des histoires pour enfants plutôt que l'inverse.

Charlotte : Je ne me suis pas posé la question, Trésor était avant tout une opportunité de travailler sur un projet BD qui semblait chouette. Et puis les dessins de Pauline donnaient envie de tester des choses. Son trait est assez dynamique et niveau couleur on pouvait vraiment s'amuser. Quand on s’adresse à un public jeune, il y a aussi un besoin d’efficacité : un défi assez chouette à relever. 

Pauline : Dessiner une BD jeunesse m'a immédiatement rassurée, j'avais le sentiment que je pourrais beaucoup plus m'amuser sur une bande dessinée jeunesse que quelque chose de « plus sérieux ». L'histoire de Trésor est très drôle, mais aussi très sérieuse avec la capacité de beaucoup pouvoir expérimenter.